Par Ahmed Hlafaoui
Combien sont-ils, parmi les Algériens, à fouiner dans les articles de la Constitution et à en apprécier la subtilité ? Un sondage sur le sujet nous édifierait, mais il n’y en a pas et il n’y en aura pas.
Comme de coutume, le texte de la loi fondamentale restera, d’abord, le fruit d’un deal entre initiés aux arcanes de la politique.
Bien sûr, dans le tas, il y en a qui sont pour le projet de révision constitutionnelle et ceux qui sont contre. Nous savons, à travers ce qui est proposé, les positions de ceux qui sont pour.
Pour ce qui concerne les autres, ceux qui sont contre, nous ne savons rien, juste qu’ils sont contre et qu’ils se sont mis ensemble pour être contre.
Faute de proposition d’un texte de leur part qui clarifierait, pour le commun des citoyens, leurs propositions, il faudra travailler à réprimer sa curiosité sur ce qui aurait pu sortir de cette coalition inédite, dàans l’histoire du pays, en termes de dispositions sur un grand nombre de sujets, et pas des moindres. Il suffit d’imaginer, à ce propos, un débat entre les Frères musulmans et les islamistes, en général, avec les « démocrates » patentés, sur la place de la religion ou sur la question du statut personnel.
Mais soit il n’aura pas lieu, éludé pour le moment et sacrifié sur l’autel de la nécessité d’étouffer les sujets qui fâchent, soit qu’il est trop tôt pour les uns et pour les autres d’opérer un toilettage en profondeur de leurs identités idéologiques.
In fine, le curieux restera sur sa faim et ne peut raisonnablement pas accorder crédit aux effets de scène. S’il est indulgent, il attendra pour savoir, ou conclura plus généralement, en étant plus lucide, à l’indigence évidente du paysage politique.
Ceci étant, le débat démocratique aurait pu avoir lieu. Et il y a un précédent très récent, dans la mémoire politique du pays. Il a été possible en 1976, sous le règne du parti unique, que soit discutée par toute la population une Charte nationale.
La chose serait encore plus aisée de nos jours. Pourtant, ni le pouvoir en place, ni ce qui fait office d’opposition ne demande à ce que la Constitution soit proposée aux citoyens. D’autant que la majorité des partis et autres acteurs auxquels elle a été adressée, toutes tendances confondues, ne représentent pas grand-chose en termes d’ancrage dans la société.
Un déni flagrant de respect à la majorité du peuple, ceux qui votent, comme ceux qui s’abstiennent de le faire, que soient conviés des quidams, souvent de pures figures médiatiques, à décider de leur destinée. Sur le simple fait qu’ils disposent d’un quitus du ministère de l’intérieur, leur reconnaissant le droit d’exercer une activité politique. Surtout que le peuple a plus de choses à dire que ce que contiennent les gesticulations qui lui sont servies, par des tribuns bien en mal de se convaincre eux-mêmes, pour la plupart, de ce qu’ils veulent.
Parmi le peuple, par exemple, ils seront certainement des millions à plutôt se concentrer sur le mode d’affectation des richesses nationales.