Par Ahmed Halfaoui
Depuis une vingtaine d’années, au moins, jamais notre pays n’a été autant sous les feux des projecteurs d’une faune de « spécialistes », d’ » analystes « , de » chercheurs « , dont les plumes sont sans complaisance aucune, avec l’état des lieux et catastrophistes à souhait.
Nous pourrions croire que les approches relèvent du souci scientifique de diagnostiquer les » erreurs « et autres » maladies « , pour aboutir à la confection des » thérapies « les mieux adaptées. Jusqu’à un certain point et seulement jusqu’à un certain point. Car avant que de se laisser prendre aux conclusions, souvent séduisantes et chantantes, il nous faut remarquer que les productions des » économistes « s’accordent parfaitement avec les positions politiques. Les critiques sont tellement coordonnées qu’elles devraient obliger à moduler leur lecture à l’aune des intérêts qu’elles portent.
Ainsi il est loisible de constater la parfaite superposition des porteurs des attaques dites » démocratiques « et des défenseurs des » réformes « économiques. En tournant le regard vers la scène internationale, la compréhension se fait plus précise. Nous pouvons observer que les pressions » démocratiques « exercées par les pays de l’OTAN vont de pair avec le diktat néolibéral. Il y a donc bien un front concerté entre ce qu’il faut appeler par leur nom » les forces du marché « .
Sur le plan interne, elles sont chargées de lutter pour démanteler tous les obstacles devant le capital marchand et sur le plan externe elles viennent en appui à des courants prêts à servir de relais. Dans l’apparence, dans les mots en vogue, le blocage du développement se situerait dans l’utilisation par le « pouvoir » algérien de l’économie comme « ressource politique ».
Par conséquent, il faudrait libéraliser l’économie, lui faire » abandonner l’économie « , pour que les dirigeants actuels ne puissent plus » contrôler la société « . Le résultat serait des plus édifiant, la société pourrait enfin être libre et s’émanciperait par la grâce d’une société civile » indépendante « , c’est-à-dire, essentiellement, les opérateurs économiques privés et les partis politiques. Ceci fait, la principale réforme à mettre en œuvre est de rompre avec l’ » économie distributive « .
Ici il est difficile d’obtenir des expli-cations publiques. Les » spécialistes « ne sont pas tenus d’aller plus loin que les » concepts « . Ce qui oblige, ceux qui veulent bien et qui ont le minimum de curiosité intellectuelle, se référer aux théories et aux pratiques en vigueur, surtout au sein des pays comparables. Le seul problème, le principal et l’incontournable, est que pour l’Algérie la notion d’économie distributive revêt un caractère complexe.
Un caractère qui réside dans le fait que la richesse identifiable et réelle ne procède d’aucune production privée, ou de façon marginale. Alors, même si nous pouvons admettre qu’il faille séparer le » pouvoir « de l’économie, il faut aussi admettre qu’il serait le plus mal venu possible de laisser des quidams, guidés par le seul appât du profit, disposer des ressources qui, en principe, appartiennent toujours à tout le monde.