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Panique en oligarchie!

Par Ahmed KACI

Intouchables jusqu’à très récemment, les oligarques sont en passe de devenir des parias dans une Algérie plus que jamais rythmée par les protestations populaires au quotidien et, de façon rituelle, les vendredis. Après l’arrestation de Hadad, c’est autour des frères Kouninef, d’Issad Rebrab, de généraux en fonction ou à la retraite et probablement d’autres figures de se retrouver sur la sellette, au moment où d’autres sont frappés d’interdiction de sortie du territoire.

Pourtant, et malgré ces actions d’éclat de la part de la justice, les engagements pris par l’Armée, qui a appelé les juges à se libérer de toute pression, par la réouverture des dossiers lourds et controversés et  de s’attaquer au phénomène de la corruption en présentant les délinquants devant les tribunaux, les Algériens demeurent dubitatifs et craignent que cela ne soit que de la poudre aux yeux qui n’aurait pour but que de calmer une rue qui exige plus « ici et maintenant », comme on dit.

L’on se rappelle que le haut commandement militaire n’est pas allé de main morte pour fustiger cette « poignée de personnes » et la qualifier de « bande » qui s’adonne à de « vastes opérations de pillage et de dilapidation » et qui « tentent… de faire fuir ses capitaux volés et s’enfuir vers l’étranger ».

En effet, l’opinion publique reste circonspecte face à cette opération Mani pulite (Mains propres) parce qu’en même temps, elle ne comprend pas la lenteur avec laquelle la justice agit, la non convocation des têtes de pont d’ « El Issaba », comme la rue les désigne allusion à Said Bouteflika, le frère du président déchu et ses acolytes au sein du régime de Bouteflika. Mais il y’a surtout comme un sentiment que tout ce charivari judiciaire ne soit le signe encore une fois d’une justice aux ordres. Une opération dont l’objectif serait l’élimination d’adversaires politiques, l’anéantissement d’hommes d’affaires appartenant au « clan » d’en face, et notamment ceux qu’on dit clairement mis sur orbite par l’ex-chef du DRS Tewfik Mediene du temps de son omnipotence.

Mais rétorquera-t-on, rien ne dit que cette suspicion ne soit pas instillée à dose homéopathique par les réseaux d’influence internes et externes des cliques mises en cause dans le cadre des enquêtes en cours. Les capacités de nuisance de celles-ci, en prolongement avec les forces extra-constitutionnelles, nichées  dans tous les appareils d’Etat, sont une sérieuse menace. Sans nul doute, et en état de panique, ne resteront-elles pas les bras croisés, face au rouleau compresseur du peuple et de la justice qui avance, doucement mais sûrement, dans leur direction et qui promet leur écrasement.

Désormais, pour elles tous les coups sont permis. Aussi, n’est-il pas étonnant qu’on accuse la justice d’être à la solde du chef d’état-major  Gaid Salah qui s’en sert comme d’une arme dans son « ambition » de « s’emparer du pouvoir à l’instar de Sissi en Egypte », de mener une politique du deux poids deux mesures sur des bases régionalistes, voire ethniques, selon le principe goebbelsien de la propagande : « Plus le mensonge est gros, plus il passe ! »

Ou encore que l’Armée, dans l’ensemble, n’aurait aucune intention de plonger la louche au fond de la « casserole » pour se saisir des poids lourds de la corruption, se contentant de cueillir les quelques têtes malchanceuses qui émergent au mauvais moment et au mauvais endroit, mais que son besoin naturel d’ordre l’incline davantage à se contenter de ravaler la face du système. « On laisse filer les choses et on referme le couvercle dés que la marmite aura refroidi  et les choses se seront plus ou moins tassées », semblent dire les plus méfiants.

S’il est encore très tôt pour juger de la volonté de l’Armée d’aller au bout des engagements qu’elle a pris sur le dossier de la corruption, ainsi que de manière générale la protection du peuple et la satisfaction de ses revendications, l’écrasante majorité du peuple n’en continue pas moins de lui manifester  respect et confiance. La patience et la sagesse maintes fois attendues par la haute hiérarchie militaire du peuple est un message qui ne souffre pourtant aucune confusion. Il signifie explicitement qu’il n’est pas aisé de venir à bout en un jour ou même en quelques semaines du pouvoir des forces de l’argent et de leur nocivité.

Et quand bien même cela se réaliserait dans des délais raisonnables et sans dommages collatéraux notamment pour la stabilité du pays, car ces cliques quasi-mafieuses sont prêtes à mettre le pays à feu et à sang pour leurs sombres intérêts, il restera le chantier exaltant des tâches d’édification nationale qui exigera d’énormes sacrifices et de la persévérance. Pour assurer que cela ne se reproduira jamais plus, il s’agira alors de s’attaquer à un système entier qu’il faudra mettre à terre définitivement. Et reconstruire sur des bases nouvelles une Algérie telle que rêvée par ses  Chouhadas et sans discontinuer toutes les générations de l’indépendance qui ont reçu ce rêve comme un legs précieux et éternel.

A.K.

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