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Macron doit reconnaitre les massacres du 8 mai 1945 comme des crimes contre l’humanité

L’historien et politologue français, Olivier Le Cour Grandmaison, a appelé le président Emmanuel Macron à reconnaitre de « façon précise et circonstanciée » les crimes commis le 8 mai 1945 en Algérie par la France coloniale comme étant des « crimes de guerre et contre l’humanité ».


Dans un entretien accordé à l’APS, M. Le Cour Grandmaison a exhorté le président de la République française, « qui prétend vouloir œuvrer à la réconciliation (des Mémoires), aura la possibilité, à l’occasion des commémorations à venir des massacres du 8 mai 1945 en Algérie, de faire en sorte que ses actes soient conformes à ses déclarations ».

« Pour cela, il faudrait qu’il reconnaisse, de façon précise et circonstanciée, que les crimes commis alors furent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité comme le prouve l’article 212-1 du nouveau Code pénal (français) »


Le docteur en Sciences politiques et enseignant dans cette discipline à l’université et aussi auteur de plusieurs ouvrages sur la colonisation française, Lecour Granmaison a précisé, à ce titre, que « les rafles, les tortures, les exécutions sommaires, les disparitions forcées commises à l’encontre de la population civile (en Algérie) l’ont été en exécution d’un plan concret », soulignant que les « éléments constitutifs du crime contre l’humanité sont donc bien réunis ainsi que l’ont établi depuis longtemps les historiennes et les historiens qui ont étudié ces massacres ».

« la justice le réclame et les descendants des victimes, les héritiers de l’immigration coloniale et postcoloniale, qu’ils soient français ou algériens, l’attendent depuis longtemps et le revendiquent sans être entendus », a-t-il précisé

Olivier Lecour Grandmaison

En ce sens, il a estimé que si 76 ans après ces événements douloureux, la réconciliation des Mémoires entre l’Algérie et la France bloque, « la responsabilité première de cette situation incombe d’abord et avant tout aux différents chefs d’Etat français et, présentement, au président Emmanuel Macron (…) Proposons donc à Macron de profiter de la date du 8 mai 2021 pour admettre enfin cela. Il sera ainsi fidèle à la déclaration qu’il avait faite le 16 février 2017 en Algérie alors qu’il était candidat à l’élection présidentielle », a-t-il appelé.

Commentant les crimes perpétré à Sétif, Guelma et Kherrata, il a tenu à rappeler que le 8 mai 1945, le jeune scout algérien Saâl Bouzid, assassiné par un policier français à Sétif, était « coupable d’avoir osé manifester pacifiquement, en portant le drapeau de l’Algérie indépendante avec plusieurs milliers d’autres +indigènes+« .

Il a en outre rappelé que les émeutes qui avaient gagné tout le Constantinois, avaient fait des milliers de victimes, « arrêtées, torturées et exécutées sommairement pour rétablir l’ordre colonial imposé par la France et terroriser de façon durable les autochtones », expliquant qu’il s’agissait pour les forces coloniales « d’agir vite et puissamment pour juguler le mouvement ».

« Encore une fois, le problème n’est plus l’établissement précis des faits, celui de l’enchaînement des événements et des éléments de contexte national et international qui ont conduit à ces massacres. Le problème n’est pas non plus celui de la qualification juridique de ces massacres, n’en déplaise à certains »



Le politologue aussi précisé que les ordres émanaient du général Raymond Duval qui commandait les troupes dans cette région et avaient été appliqués à la lettre car « la France libre était prête à tout pour défendre l’intégrité de son empire jugée indispensable à son statut de grande puissance ».

A une question sur le rapport de l’historien français Benjamin Stora qui s’est montré évasif sur les massacres du 8 mai 1945, alors que ses recommandations demeurent muettes sur les crimes commis par l’armée coloniale, M. Le Cour Grandmaison a rétorqué :

« Maintenant que le rapport est en possession du président Macron, la responsabilité est désormais exclusivement la sienne. Encore une fois, le problème n’est plus l’établissement précis des faits, celui de l’enchaînement des événements et des éléments de contexte national et international qui ont conduit à ces massacres. Le problème n’est pas non plus celui de la qualification juridique de ces massacres, n’en déplaise à certains », a-t-il relevé.


« L’article précité du Code pénal le prouve. Rappelons, et c’est pour moi l’occasion de lui rendre une nouvelle fois hommage, que l’avocate bien connue, Nicole Dreyfus, s’était depuis longtemps prononcée en ce sens », a-t-il noté, précisant que « le problème est donc uniquement un problème politique et il appartient à Macron de l’affronter pour le résoudre enfin en reconnaissant ce qui a été perpétré à partir du 8 mai 1945 en Algérie », a conclu M. Le Cour Grandmaison dont le dernier ouvrage (Ennemis mortels) est paru en 2019 aux éditions La Découverte.

LIRE AUSSI : L’auteur de “L’ennemi intime”: en France “les origines de l’islamopobie sont coloniales”

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