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Chronique d’une guerre des pipelines dont le Maroc ne possède pas les clés [1e partie]

La décision prise par l’Algérie de revoir ses relations le Maroc ira-t-elle jusqu’à couper le pipeline qui alimente l’Espagne en passant par le Maroc ? Manifestement les stratèges de la diplomatie économique, marocaine inconsolable par ses nouvelles alliances n’a pas retenu la leçon de l’exemple Ukrainien lorsqu’il Kiev tentait d’utiliser la carte du gazoduc russe qui traverse son territoire pour alimenter l’Europe, sans tenir compte des cartes aux mains de Poutine, qui compte contrôler 70% des besoins de l’UE d’ici 2050.  

PAR | AHMED ZAKARIA


Tout porte à croire qu’Alger a décidé de ne plus reconduire le contrat d’exploitation du gazoduc Maghreb-Europe qui relie sur 1400 Km le gisement gazier de Hassi R’mel à l’Espagne, dont 540Km traversent le Maroc. Est-ce le facteur politique seulement qui motiverait une telle décision ? Quel impact aura cette décision en réponse à l’inconsolable politique du chantage exercé par le régime du Makhzen envers ses voisins Espagnoles et Algériens, depuis son alliance avec son nouveau « souteneur » l’ »Israël » ? Comment l’Algérie a-t-elle assuré l’acheminement de son gaz vers son partenaire européen pour faire face à une déclaration de guerre de pipelines dont le Maroc ne possède pas les clefs ?

L’agence officielle algérienne l’APS, a apporté ce samedi des éléments de réponse quant à l’avenir de ce gazoduc, laissant entendre que l’Algérie est susceptible de s’en passer à n’importe quel moment, tout en dénonçant les « mensonges » de la directrice générale de l’Office Marocain des Hydrocarbures et des Minéraux (OMHM), Amina Benkhadra, qui dans une déclaration rapportée pat un site marocain, que son gouvernement « soutient la poursuite de l’exploitation de l’oléoduc qui représente un  outil de coopération régionale »

La représentante de l’Office semble avoir totalement omis les annonces de ces gouvernants et leurs relais médiatiques traditionnels, qui exhibaient la carte d’un projet de gazoduc, qui relèvent plus du marketing politique, que d’un fiable projet économique. Tous les experts se sont accordés à dire qu’il est techniquement et géopolitiquement irréalisable. Le gazoduc (Nigeria-Morocco Gas Pipeline en anglais, NMGP), qui se fera au bonheur du Roi, au détriment des intérêts de l’Algérie et de l’Espagne, est long de 5.700Km. Il devrait relier Abuja aux côtes de la péninsule ibérique, via les territoires marocains. Le hic est qu’il devrait impliquer tous les pays ouest-africain, de la zone franc CFA (CEADO), et surtout les territoires du Sahara Occidental et la Mauritanie, allié de l’Algérie.

D’ailleurs, vu ses capacités de transport, limitée à 5milliards de mètres cube, il n’apportera pas beaucoup au Nigeria qui, in fine, ne pourra exporter via cet oléoduc que 3 milliards de mètres cube/an.

En parallèle et dans le même élan d’hostilité, les autorités marocaines ont laissé comprendre à Madrid que Rabat risque de ne plus renouveler le contrat d’exploitation du Gazoduc Maghreb-Europe comme châtiment à « l’impardonnable » accueil par Madrid, d’Ibrahim Ghali, le président de la République Sahraoui, pour des raisons de santé.

Cet énième dérapage a provoqué la colère d’Alger et Madrid qui ont accéléré la réalisation du méga projet de Medgaz et damé définitivement le pion du Roi Mohamed 6.

Pour qui roule la diplomatie de Mohamed VI ?


A vrai dire le Maroc qui n’avait d’atout dans le projet du gazoduc avec le Nigeria, que sa proximité avec les côtes espagnoles.  Comment peut-il abandonner ce qu’il a entre les mains et chercher le gaz ailleurs ?

Le président du gouvernement, Pedro Sánchez, lors de sa visite en Algérie l’année dernière 08/10/2020. par la force des choses les deux pays sont devenus des alliés objectifs

Les deux alliées Alger et Madrid ont par le nouveau gazoduc Medgaz damé le pion au voisin maître chanteur, avec la conviction que tout projet d’acheminement de Gaz du Nigeria, ne peut être fiable que s’il passe par l’Algérie via le Niger.

Medgaz relie directement les installations algériennes de Béni-Saf au port d’Almeria en Andalousie et 60% du gaz qui y transite est destiné au marché espagnol. Cette réalisation renforce largement, les capacités du pétrolier algérien Sonatrach, à commercialiser du gaz naturel liquéfié GNL vers l’Europe. D’autant que le transport via ce gazoduc, offre un avantage compétitif incontestable comparativement au recours aux méthaniers.

Aussi cette réalisation offre plus de flexibilité au Groupe Sonatrach, dans les opérations de raccordement et la livraison de gaz naturel par canalisation. Les quantités de gaz liquéfié n’ont que 3 heures pour atteindre le côté espagnol. Autrement dit, En procédant à la mise en service de l’extension du gazoduc Egpdf, l’Algérie, tout en anticipant tout conflit d’intérêts avec le Maroc, pourra utiliser Medgaz pour honorer son engagement de transporter la totalité des 10 milliards de mètres cubes de gaz, qu’elle a contractés avec l’Espagne sans avoir recours au pipeline Maghreb-europe qui passer par le Maroc. Une telle décision ne devrait pas être sans conséquences sur l’économie marocaine.

Si l’Algérie va au bout des choses, le Maroc devra dès l’hiver prochain acheter près de la moitié de sa consommation de gaz sur un marché indexé sur le prix du Brent, en constante augmentation, et sans le soutien de l’Espagne. Déjà, qu’en 2020, le Maroc a vu ses revenus tirés des royalties sur le passage du gazoduc Maghreb-Europe, baisser de 55%. Soit plus de la moitié par rapport à l’année 2019. Selon les chiffres de la direction des douanes et des impôts marocains.  

Le pipeline transsaharien Nigeria Niger Algérie vers l’Espagne et l’Italie

Par ailleurs, l’Algérie ne veut pas s’arrêter là. Lors de sa rencontre avec le président Tebboune à Alger, le président Niger Mohamed Bazoum a exprimé son enthousiasme pour la relance de ce projet du Gazoduc « Transaharien » qui acheminera le gaz du Nigeria via son pays. Il faut dire qu’avec 10% des parts sociales du projet, le Niger a tout à y gagner. Les deux dirigeants ont donc mis l’accent sur la nécessité de finaliser le projet laissant l’impression que le Nigeria serait partant, pour moultes raisons objectives.

Cette annonce intervient quelques mois plutôt, de la visite de l’ancien ministre des affaires étrangères M Sabri Boukadoum qui est parti en éclaireur à Abuja afin de discuter des opportunités de la concrétisation du vieux rêve qui date des années 80. Les deux pays partagent en effet, 3 mégaprojets. Il s’agit de la route transsaharienne Alger-Lagos, le gazoduc transsaharien, reliant le Nigeria à l’Europe via l’Algérie et la liaison par fibre optique Alger-Abuja.

Le Projet du gazoduc transsaharien peut transporter jusqu’à 30 milliards de mètre cube, a suscité beaucoup d’intérêt du côté européen notamment les deux partenaires de l’Algérie, l’Espagne est l’Italie, qui a perdu la bataille d’approvisionnement de gaz russe le Stream 2 face à l’Allemagne.

Avec une longueur totale de 4 128 kilomètres sa capacité annuelle de 30 milliards de mètres cubes. Il est prévu d’être détenu à 90% par le groupe Sonatrach et la NNPC (Nigerian National Petroleum Corporation), et à 10% par la Compagnie Nationale du Pétrole du Niger, d’un coût estimé à 10 milliards de dollars. Il devrait partir de Warri au Nigeria et aboutira à Hassi R’mel en Algérie en passant par le Niger sur un tronçon de 841 km.

Le transsaharien représente pour la plupart des pays européens une opportunité pour échapper à la guerre des pipelines qui oppose les Etats unis et la Russie, qui met en difficulté leur approvisionnement en Gaz, . Mais

Quelques semaine plus tard, les pays de la CEADEO, dont la politique économique et monétaire dépend essentiellement de l’ancienne puissance coloniale la France, ont à leur tour, annoncé une réunion dont l’objectif est « d’échanger avec les Etats membres sur les développements actuels liés au projet d’extension du gazoduc de l’Afrique de l’Ouest ». Certains observateurs ont expliqué que les manœuvres des pays de la CEADEO ne visent finalement qu’à déstabiliser davantage le climat dans lequel émerge le projet du transsaharien.

L’obstination du Maroc qui croule sous le poids des dettes publiques extérieur, avec un taux d’endettement qui frole les 100%, relève de l’habituelle politique hasardeuse de ce régime. Les experts ont estimé qu’au-delà de la faible quantité à transporter, le coût du Morocco Gas Pipeline en anglais, NMGP qui s’élève à plus de 20 milliards de dollars, demeure au-dessus des capacités financières des deux pays.

Il faudra ajouter à cela, que le NMGP dépend d’un autre sous-marin existant le Ouest-Africain, qui sur une longueur de 678 km relie le Nigeria au Bénin, au Togo et au Ghana. Ses parts sociales gérées par la société Wapco, appartenant à consortium d’Etats et de multinationales telles que Shell et Chevron.

La CEADEO avait pour objectif de le prolonger en longeant les côtes des pays de l’Afrique de l’Ouest pour joindre le Maroc. Il traverserait le territoire de nombreux pays dont le Sénégal, la Mauritanie, mais aussi, le Sahara occidental, membre à part entière de l’Union Africaine, et en état de guerre avec le Maroc.

 Les experts ont désigné le principal inconvénient technique sérieux.  D’un diamètre de 20 pouces seulement, Sa capacité de transport est donc limitée à 5 milliards de mètres cube par an. En conséquence, le Nigeria ne peut mettre qu’une quantité supplémentaire de 3 milliards de mètres cube, sur lesquels il faudra déduire 1 milliards de mètres cube pour la consommation du royaume chérifien.

Le géant gazier Russe Gazprom: Difficile de passer inaperçu

Par ailleurs, la politique du géant étatique russe Gazprom suite à l’altération des relations entre l’Ukraine et la Russie, n’a pas laissé insensibles, les pays de l’Union Européenne qui se sont penchés sérieusement sur l’idée de diversifier leur sources d’approvisionnement en passant par l’Alfrique. Mais il se sont encore une fois, emboités le pas, par Gazprom qui a anticipé le coup sur la partie africaine de l’echequier et réussi dès 2006 la signature d’un contrat de partenariat avec Sonatrach et la création en 2009, d’une join-venture « Nigaz » pour la l’exploitation et la distribution des hydrocarbures. le premier objectif de Nigaz surtout la réalisation du premier tronçon du TSGP qui part vers le Nord du Nigeria. L’offre russe de mettre 2.5 milliards de dollars, pour la construction de réseaux de transport du gaz, a fini par séduire la partie nigériane. ce qui expliquerait peut être les retards et le flou qui a entouré ce projet pendant une période qui a durer assez longtemps pour profiter au européens qui, -de bonne guerre- cherche à tout prix empêcher les russes de circonscrire tout possibilité de diversification des sources d’approvisionnement de l’Union Européenne.

L’Algérie dispose donc de toute les cartes pour dévitaliser le rôle du supplétif traditionnel du Makhzen en finalisant le projet du gazoduc panafricain qui renforcera sa position géostratégique, tout en se tenant à bonne distance, aussi bien des intérêts de la Russie, que ceux des partenaires et voisins européen.

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