Par Ahmed KACI
Le système de surface, incarné par le régime politique de Bouteflika, est en miettes. Le système souterrain oligarchique de domination est toujours en place. Cette victoire a été arrachée en un peu plus d’un mois de mobilisations. Cela n’est pas rien d’autant que ce succès à l’actif du mouvement populaire s’est déroulé sans la moindre violence notable.
Certes, l’Armée, en tant qu’institution souveraine, a pesé de tout son poids moral pour éviter au pays de plonger dans les affres des « Révolutions arabes » de triste nom, en se rangeant sans équivoques du côté du peuple. N’en déplaisent aux objecteurs de consciences et autres antimilitaristes patentés, elle ne l’a pas fait pour son intérêt propre ou dans un esprit clanique, comme on peut le lire ici et là et exprimer par la bouche d’autoproclamés de la protestation en cours en Algérie.
Faut-il rappeler que l’ANP est l’héritière de l’ALN, celle qui a réalisé le barrage vert, la transsaharienne, défendu le pays contre la horde des mercenaires intégristes et refusé toutes les incitations atlantistes à l’impliquer dans des conflits extérieurs et régionaux que sa doctrine de sécurité nationale lui interdit. C’est dire si ceux qui poussent des cris d’orfraie sur une prétendue menace de prise de pouvoir par les militaires, à l’exemple de ceux qui s’est passé en Egypte, allant jusqu’à qualifier la démission de Bouteflika de putsch, sont ceux-là même qui rejetaient tout comparaison avec la Syrie, la Libye ou l’Irak.
C’est pourquoi, le mouvement social ne peut se passer du bouclier de l’armée pour renverser le système oligarchique. Système dont la colonne vertébrale ne se limite pas à la disqualification des têtes de gondoles des quelques partis politiques, qui avaient apporté leur soutien au cinquième mandat de la honte, comme les Ouyahia, Bouchareb, Ghoul, Amara Benyounes et le reste de la ménestrandise.
L’arrestation et l’incarcération d’Ali Hadad et le déclenchement d’enquêtes qui visent une douzaine d’autres est une mesure susceptible d’affaiblir le clan des affairistes compradores, mais restera sans conséquence tant la source de leur emprise sur l’économie du pays n’est pas asséchée. Cette oligarchie n’aurait pu connaître un développement fulgurant, ces dernières années sans le concours du mandarinat assoiffé de privilèges, qui sévissait notamment, au sein de la haute bureaucratie d’Etat aussi bien civile que militaire.
D’où l’épuration des rangs des appareils de l’Etat des éléments véreux et antinationaux ne peut pas passer sans soulever le rôle et le poids de certaines élites médiatiques liés organiquement ou idéologiquement au système oligarchique. L’expérience vénézuélienne devrait servir d’exemple à ne pas reproduire où une caste journaliste jamais élus s’érige en volonté populaire et mène une guerre de déstabilisation contre un gouvernement légitime.
En Algérie, il est de notoriété que des médias, connus pour leurs accointances occidentales ou proches des monarchies réactionnaires, voire atlantistes ne reculent devant rien pour désigner du doigt l’institution militaire, cherchant même à l’opposer au mouvement populaire, à travers une propagande visant à dénaturer son rôle et à troubler l’opinion, dans le but évident d’empêcher le processus de rupture révolutionnaire avec les centres de soumission impérialiste qui se dessine. Et que les mots d’ordre et autres slogans expriment de la façon la plus radicale.
Le rôle funeste de ces médias ne diffère guère en cela de celui des acteurs des guerres de domination impérialiste de 4ème génération et des changement calquées sur les théories de Ordo ab chao ou de l’ordre naît du chaos. L’appel au rejet de « toute transition clanique », lancé par un collectif, se voulant représentatif de la société civile, et relayé dans la presse, est des plus inquiétants, à tel point qu’un observateur averti comme l’intellectuel Moahmed Bouhamidi n’hésite pas à écrire sur sa page Facebook : « ONG et Otpor en oeuvre pour faire de notre Hirak un « printemps arabe.» Ce collectif, très actif dans la diaspora, tente, en réalité, en usant de formules « séduisantes » de mettre l’Armée hors-jeu et imposer au pays une transition comparables à celles qui ont aligné les pays de l’ex-bloc communiste sur le consensus de Washington.
Avec la présence indiscutable des réseaux d’influence OTPOR et Soros et leurs agissements perfides, le mouvement populaire est contraint plus que jamais à redoubler de vigilance et s’appuyer sur la seule force organisée à même d’éviter au pays d’être entraîné dans les voies sans issue et la violence.
La justice, qui a longtemps servi de bras armé juridique, aux mains du système oligarchique et leurs nervis par intérêt ou par carriérisme, est appelée, dans ces moments d’incertitudes, à revoir son logiciel répressif dans le but de protéger le pays et son mouvement de libération des tentatives de détournement vers la violence. Le renversement de l’oligarchie n’est pas une sinécure !