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Remaniement ministériel en Algérie: quel cap pour dépasser la crise?

Par Ahmed Zakaria

Alors que les voyants économiques nationaux et internationaux demeurent en rouge, le Président algérien Abdelmadjid Tebboune a procédé, ce 23 juin, à un remaniement ministériel partiel. Quels indicateurs et signaux significatifs peut-on retenir de ce remaniement ? 

Beaucoup d’observateurs reprochaient, à raison ou à tort, une certaines torpeur qui a touché certains départements, ou encore une difficulté à tenir des discours chargés de visions globales et à longs termes, alors  que la situation accentuée par la recrudescence de la pandémie du Covid-19 et la fragilité du marché pétrolier, pèse lourdement sur le quotidien des Algériens et exige des actions urgentes. La question numéro 1 est de sortir coûte que coûte de la dépendance à la rente pétrolière.

Selon nos sources, il s’agit beaucoup plus d’une restructuration, afin de constituer une équipe plus resserrée et plus technique, tout en gardant les membres ayant fait leurs preuves, à la tête de leurs département respectifs.

Le gros des changements touche les ministères stratégiques, notamment l’énergie, les mines et les finances.

Tous les ministères régaliens, à l’exception de l’intérieur, ont gardé les même responsables à leur tête. Il s’agit, en l’occurrence,  Sabri Bougadoum, aux Affaires Etrangères, qui a pu avancer, avec brio, les pions de la diplomatie algérienne sur l’échiquier international, notamment sur le dossier libyen, et Belkacem Zeghmati, le ministre de la Justice.

L’originalité est la nomination de Mohamed Arkab, à la tête d’un nouveau département dédié aux Mines. Après avoir réussi à restructurer, dans un climat particulièrement hostile, le secteur de l’énergie en l’adaptant aux humeurs intempestives du marché mondial et en permettant au pétrolier algérien Sonatrach de reprendre confortablement la main sur les richesses du pays, M. Arkab sera chargé de développer un secteur sur lequel repose les nouveaux paris du Président Tebboune.

Ce qui explique le choix de séparer le secteur des mines du département de l’industrie, c’est son caractère stratégique grandissant, au regard du potentiel extraordinaire dont dispose l’Algérie qui – au-delà des réserves démesurées de minerais de base tels le phosphate, le fer –  regorge de terres rares qui constituent les minerais stratégiques du futur.  Ces minerais sont abondamment utilisées dans les technologies de pointe et notamment « vertes ». C’est une activité totalement nouvelle qui pourrait booster les autres secteurs, sa technique d’extraction pourrait complètement changer la donne.

Arakab, à son tour, donne la main à un ancien de Sonatrach à la tête du ministère l’Energie. Abdelmadjid Attar, ancien PDG du géant pétrolier public algérien  (1997-2000), connait bien les arcanes de Sonatrach et dispose d’un réseau appréciable à l’international. Des indiscrétions annoncent déjà un grand ménage au sein de la Compagnie.

S’il y a un ministre qui sera bien dans son éléments, c’est bien le Professeur Chemseddine Chitour. Cet ancien directeur de l’Ecole Polytechnique a été éloigné du ministère de l’Enseignement Supérieur, pour être à la tête du ministère des Energies renouvelables.

Anti-rente pétrolière et fervent défenseur de la transition énergétique, il sera chargé de propulser ce tout nouveau secteur, dans l’Algérie s’est engagée depuis peu, avec plusieurs partenaires, notamment l’Allemagne. Une confirmation de l’importance accordée à ce secteur dans l’avenir.

L’autre changement majeur concerne le ministère des Finances. Abderrahmane Raouya cède son fauteuil au gouverneur de la Banque Centrale, Aymen Ben Abderrahmane. Celui-là même qui vient de donner des chiffres alarmants sur la chute des liquidités bancaires et sur la baisse des réserves de change, tombées sous les 60 milliards de dollars (55 milliards d’euros) fin mars, contre 79,88 milliards de dollars (73 milliards d’euros) fin 2018 et 97,22 milliards de dollars (88,8 milliards d’euros) fin 2017.

Ben Abderrahmane, l’un des opposants à l’option de l’endettement et de « la planche à billets » , devra travailler avec le Professeur Belmihoub, désigné à la tête d’un ministère délégué à la Prospective.  Le Pr Belmihoub est une personnalité connu pour sa compétence et sa rigueur, il aura un rôle clé dans la nouvelle équipe du Chef du Gouvernement Abdelaziz Djerrad.

Héritier d’une décennie de gabegie institutionnalisée, le Gouvernement va travailler avec le mot d’ordre : « pas de planche à billets,  pas de recours au FMI ». Quelle sera donc la politique du Gouvernement ?

 

Jusque-là, le Gouvernement avait réduit de moitié le budget de fonctionnement de l’Etat et annoncé  une réduction de la facture des importations de 41 à 31 milliards de dollars. Dans la même veine, Sonatrach, qui a récemment racheté les parts de Total dans les actifs d’Anadarko et des parts dans le Gazoduc espagnol, a décidé, à son tour, de réduire son budget 2020 de 50%, soit l’équivalent de 7 milliards de dollars.

Alger a également renoncé à recourir aux cabinets d’expertise étrangers pour ses grands projets afin d’économiser 7 milliards de dollars (6,5 milliards d’euros) par an.

Selon des prévisions du FMI, l’Algérie devrait connaître une récession en 2020 (-5,2%) ainsi qu’un déficit budgétaire parmi les plus élevés de la région MENA, en raison de la crise pétrolière et de la pandémie du Coronavirus.

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