Par: Ahmed Halfaoui
Tout laisse croire que l’Algérie est en train de changer, par le bas, sans que les «changeurs» à la mode «arabe», sponsorisés par les «grandes démocraties», trouvent un quelconque ancrage dans cette lame de fond, qui pose les vraies questions des citoyens réels.
Il n’y a qu’à observer que toutes les revendications révèlent les véritables dérives et non pas les noumènes, en vogue dans les menaces aéroportées que lançaient Hillary Clinton et ses larbins européens.
La première et la plus déterminante de ces dérives est l’abandon de la souveraineté nationale au profit des marchands internationaux.
C’est elle qui explique le plus que les richesses nationales ne contribuent pas au développement du pays (pays riche, peuple pauvre), mais à la prospérité des fournisseurs étrangers et de leurs relais locaux, quand l’investissement public peut résoudre un grand nombre de problèmes, dont ceux de la croissance et de l’emploi.
La pression populaire pousse surtout dans ce sens, qui ne se satisfera pas des mesurettes «patriotiques» qui, de toutes façons, ne peuvent suffire à inverser ou à refondre une économie extravertie et livrée aux vents capricieux du marché mondial.
S’ouvriront, bientôt, les débats concrets sur le sujet. Parce qu’il n’y a pas une autre réponse économique que celle-ci. L’utilisation pleine et entière de nos ressources dans l’industrialisation du pays et la dynamisation de notre agriculture.
La deuxième dérive, qui a beaucoup à voir avec la première, est le climat propice aux «affaires» qui s’est créé (l’euphorie libérale et la panique de rester sur le carreau) et qui a provoqué une course effrénée à l’accumulation, avec tout ce que cela suppose comme «dessous de table» nécessaires pour se frayer le chemin, vers les contrats juteux, dans la jungle des tractations commerciales et irrésistibles pour des fonctionnaires et des bureaucrates aspirés par le délire de l’enrichissement.
On appelle cela la corruption, pour la dissocier, du point de vue moral, du système qui la nourrit et sans lequel elle ne pourrait exister.
La troisième dérive est d’avoir cru que le peuple croit à l’économie de marché et qu’il allait en accepter les règles, alors qu’aucun peuple au monde ne l’a fait de son propre gré.
Ce qui fait qu’on soit devant ce qu’il pense et qu’il exprime dans différents modes opératoires. Le personnel politique au pouvoir essaie de réagir au coup par coup. Mais, la dynamique semble en route pour que le changement soit une révision complète des données politiques qui ont exclu ceux pour qui les mots démocratie et droits de l’homme veulent dire autre chose que le «chacun pour soi» dans une course à armes inégales où les déjà nantis et les «bras longs» sont en pole position.
Le minima requis se trouve dans la rupture des accords internationaux léonins et la libération complète de l’initiative économique de l’Etat, qui compensera les chimériques IDE. Il y a un pays à reconstruire et un peuple qui attend.
En Tunisie, le débat a été ouvert, et on a fait peur aux Tunisiens. Le patron des patrons de ce pays, M. Ben Sedrine, lançait l’alarme : «Le recours obsessif à l’Etat Mama, au niveau de l’emploi, est une chimère… Car les pansements et les charpies étatistes ne servent à rien dans les tranchées de la crise sociale…».
Son argument est que nous sommes dans : «un monde où les forces du marché et les agences de notation dominent la planète. Organisent la compétition entre les nations. Contrôlent les richesses. Assurent la gouvernance mondiale».
Soit exactement ce qui a été dit pour que l’Algérie détruise ses capacités de production, démantèle les dispositifs de protection de son marché et sombre dans l’apathie, en quête inassouvie d’investissements illusoires.