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Du jour après la marche du 29 mars 2019 au jour d’après la réunion de l’État-major.

Cette contribution nous vient de l’un de nos aînés dans le journalisme. Né le 27 novembre 1947 à Alger au sein d’une famille de résistants.  M. Bouhamidi, Professeur de philosophie, militant syndicaliste et politique, directeur de la culture et chroniqueur. Nous publions régulièrement son vision sur des sujets brûlants de l’actualité

 

Par : Bouhamidi Mohamed

Le communiqué de l’État-major du 30 mars 2019 éclaire de façon nette certains aspects essentiels.
Ce communiqué est celui de l’armée et une déclaration de son chef, le général Ahmed Gaïd Salah. De ce point de vue l’armée lève une confusion sur laquelle ont joué beaucoup d’intervenants actuels.
Pourtant le déroulé des déclarations de Gaïd Salah montrait clairement un changement progressif mais radical. Les deux premières interventions de Gaïd Salah, notamment celle du mardi 26 février, soutenaient le déroulement des élections à la date prévue. Les deux premières déclarations ont été perçues à juste titre comme des mises en garde, voire des menaces, à l’endroit du Hirak. Les deux déclarations attestaient que pour lui l’élection allait se dérouler et qu’elle serait sécurisée.
Ces deux déclarations ont été recadrées par la suite, recadrage qui tentait d’atténuer l’impression de soutien au président Bouteflika. La réflexion la moins clairvoyante pouvait deviner que ses collègues ne le suivaient pas sur ce terrain de l’alignement sur son ami le président et nous envoyaient les signaux que l’armée en tant que corps avait un autre avis.
Le proverbe dit que c’est la première impression qui compte. Elle restera dans nos têtes comme une position immuable. Cela nous gênera pour saisir pleinement les messages à peine codés des déclarations suivantes. Ces déclarations glissent vers :
1- la reconnaissance de la qualité patriotique des manifestations, c’est à dire de leur légitimité. C’est cela le contenu. Derrière le contenu manifeste de la qualité patriotique se faisait jour la reconnaissance de leur légitimité. Ce qui rendait, par jeu de miroir, illégitime la candidature du président Bouteflika.
2 – vers la convergence de vues entre l’ANP et le peuple et la glorification de cette convergence.
3 – vers la nécessite de trouver une solution parmi les solutions possibles. Cette déclaration a été le point de franchissement qui a porté l’ANP du côté du peuple. Il fallait un manque total de discernement pour ne pas le comprendre et comprendre que l’ANP préservait l’ordre du droit constitutionnel, ce même droit à opposer aux ingérences étrangères. Toute transgression du droit constitutionnel est une autorisation donnée à l’intervention étrangère. Cet appel ne sera pas entendu par le clan du président, spécialement Belaiz, nommé président du conseil constitutionnel en dépit du droit.

4 – La résistance du clan présidentiel qui joue la montre contre le peuple pousse enfin l’armée à exiger l’application de l’art. 102.

Le peuple comprend parfaitement l’enjeu, refuse de suivre le slogan anti-Gaïd Salah qui est en fait un slogan anti ANP, et invite l’armée à aller plus loin en détaillant les mesures d’accompagnement : départ de Belaiz, départ de Bensalah, nouveau gouvernement aux membres impeccables de compétence et d’intégrité morale, nouvelle commission de contrôle des élections, une instance présidentielle provisoire etc.
« Préserver la pérennité de l’Etat et réaliser les aspirations de la mobilisation populaire », voilà lé défi qu’a compris notre peuple et l’équation telle que l’a résumée un ami.

Tous les partis et personnalités politiques qui réclamaient l’ingérence de l’armée depuis au moins deux ans, se retournent contre elle. Le point de cohérence de leurs positions est la volonté de détruire l’ordre constitutionnel, qui est mauvais et même pourri mais qui est l’ordre qui permet de préserver l’unité de l’État. Et si une personne ne comprend pas :cet ordre permet la continuité du fonctionnement des services de l’Etat.
Le clan lui-même du président et celui des oligarques avaient un besoin urgent que l’armée glisse hors des règles constitutionnelles pour obtenir des puissances étrangères une reconnaissance à la « Juan Guaido » du Venezuela, une reconnaissance d’un pouvoir civil, celui qui prolonge le pouvoir des oligarques contre l’exigence du peuple d’un autre État conforme aux annonces de novembre et de la Soummam.
Ce dernier communiqué publié après des images d’une réunion solennelle vient confirmer que Gaïd Salah parlait depuis le 28 février au nom de l’armée et non en son nom personnel. Il ajoute deux éléments clés du rapprochement de l’ANP et du peuple, les arts 7 et 8. C’est à dire qu’il oppose à la légalité de Belaiz et du Conseil Constitutionnel le principe philosophique et éthique que la souveraineté du peuple est supérieure à la légalité des institutions y compris celle de Belaiz et du Conseil Constitutionnel et donc aussi celle de Bensalah et du Sénat si le besoin venait à s’en faire sentir.
Nous sommes arrivés à ce carrefour, où nous pouvons garantir le départ du président et de ses oligarques sans mettre en danger ni l’existence de notre État dont il faudra lui recouvrer sa souveraineté, ni notre pays.
Ces trois articles avancés par l’ANP peuvent amplement servir de base pour une transition qui arrache notre pays aux griffes de la France, de l’Union Européenne, des USA, des multinationales.
Seule l’unité avec l’armée sur ces principes et ces articles de la constitution peut nous faire avancer.
Mais seule la mobilisation populaire et celle des vendredis en particulier peut garantir cette voie de succès et la construction :

– d’une souveraineté intransigeante de l’État,
-la propriété publique de nos ressources minières et naturelles et d’abord le pétrole,
-l’interdiction de toute forme de privatisation de ces richesses sous le prétexte d’en appeler à l’expertise étrangère,
– la garantie des libertés démocratiques d’expression, de création de partis et d’association, de réunion et de manifestation, d’édition.
– la dissolution des polices politiques et une plus grande vigilance face aux dangers de subversions externes.
– la réalisation du caractère social de l’État par la garantie d’un système de santé et d’éducation performants et gratuits, d’une préservation des secteurs de la culture et du sport de la sphère marchande, de la garantie de l’énergie et de l’eau à usage domestique pour tous et dans toutes les régions.
– le développement économique autocentré et la défense de notre production nationale par des barrières douanières conséquentes.
Il faut maintenant par notre mobilisation :

-aider l’ANP se rapprocher encore plus de nous et
-sceller avec elle la même alliance stratégique qui nous soudait à l’ALN par la force de nos slogans, de nos mots d’ordre et par notre volonté de les faire tous partir, ces éléments du système de Bouteflika et de son oligarchie,
– commencer à créer nos partis, nos associations dans notre diversité nationale pour contribuer à la naissance du nouvel État indépendant, souverain et démocratique que nous rêvons.

Il faut aussi maintenant faire face aux manipulateurs cachés que l’ampleur de notre mobilisation a désarmés, qu’ils soient les agents des oligarques, des appareils politiques, ceux d’Otpor ou les amis de BHL.

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