Par | Ahmed Zakaria
Pour le huitième jour consécutif, les foules continuent de déferler de toutes les régions sur les rues et les places à proximité de l’ambassade israélienne dans la capitale jordanienne Amman. Les manifestants promettent de ne pas arrêter leur mouvement jusqu’à la fermeture définitive de l’ambassade et l’annulation de l’accord de paix avec l’entité sioniste signé en 1994.
Des appels ont été lancés pour que les prières du Ramadan Tarawih aient lieu à proximité de l’ambassade, ce qui a poussé les forces de l’ordre de dresser des barrières de circulation provoquant des embouteillages qui ont asphyxié les rues de la capitale. Les rudes journées du jeûne n’ont pas empêché les plus fervents de tenter d’atteindre le bâtiment de l’ambassade, mais les forces de sécurité les en ont empêchés.
Les participants à la manifestation ont brandi des banderoles glorifiant la résistance palestinienne et dénonçant le génocide en cours, perpétré par Israël dans la bande de Gaza. Ils ont appelé le chef de l’armée d’ouvrir les frontières pour que les jeunes puissent combattre et venir en aide à leurs frères.
Selon des témoignages sur place, les forces de sécurité jordaniennes ont tenté en vain, de disperser par la force des manifestations et des marches dans la banlieue de Rabieh (banlieue de la capitale jordanienne, Amman), où se trouve l’ambassade d’Israël. A défaut de stopper la déferlante humaine, la police qui a quadrillé la capital et les alentours de l’ambassade israélienne, a procédé à la chasse aux meneurs. Des dizaines de militants, hommes et femmes ont été interpelés.
Parmi les personnalités influentes se trouvaient la militante syndicale, l’ingénieur Maysara Malas, et le chercheur sur les affaires de Jérusalem, Ziad Ibhais, et la militante Nour Abu Ghosh a également été arrêtée, a rapporté la chaîne qatari Aljazeera.
Depuis environ deux mois, la Jordanie est témoin de manifestations en solidarité avec les Palestiniens. Début novembre dernier, Amman a rappelé son ambassadeur en Israël et a informé Tel-Aviv de ne pas renvoyer son ambassadeur, qui avait précédemment quitté le royaume.
Lors d’un entretien téléphonique avec le président américain Joe Biden, le roi Abdallah II de Jordanie a appelé à la nécessité pour les États-Unis de jouer un rôle de leadership en favorisant un horizon politique permettant à la question palestinienne de parvenir à une paix sur la base de la solution des deux -d’états.
Alger et Ryad: Les deux issues pour échapper au piège israélo-américain
La guerre à Gaza qui alimente la colère des jordaniens constituera-t-elle un point de basculement dans les relation entre la Jordanie et l’Etat sioniste, déjà détériorée après l’assassinat de deux jordaniens par un diplomate israélien à Amman, en juin 2017.
Lors de cet incident, le garde de l’ambassade israélienne Ziv Moyal a tué deux Jordaniens après que l’un d’eux « l’aurait attaqué », déclenchant une crise diplomatique entre les deux pays.
Il convient de noter que la Jordanie, qui a signé un traité de paix avec Israël en 1994, a empêché l’ambassadrice israélienne Einat Shlein de reprendre ses fonctions ainsi que le reste des employés de l’ambassade qui ont quitté le pays.
Il faut noter qu’avec la montée de la grogne sociale provoquée par les tueries perpétrées par l’armée et les colons sionistes à Gaza et en Cisjordanie, donnent de très sérieuses alertes quant à la stabilité du régime Hachémite.
La Jordanie n’a pas besoin de nouvelles crises. L’économie du pays est confrontée à de très graves problèmes. Les distorsions structurelles sur le marché du travail jordanien ont contribué de manière significative à la hausse du taux de chômage du pays, qui a atteint 23%, au début de cette année. Aussi, la crises qui entrave gravement l’économie du pays est la pénurie d’eau, tandis que la hausse des prix du carburant a alourdi le fardeau économique.
Ces dernières années, ces questions ont suscité un mécontentement généralisé, qui s’est manifesté par de nombreux Jordaniens manifestant dans les rues, poussant le gouvernement jordanien à réfléchir sur une solution stratégique qui pourrait lui épargné le piège que lui tend le gouvernement de Netanyahu.
Les problèmes auxquels est confrontée la Jordanie ne peuvent pas être pleinement compris au niveau local. Les troubles régionaux et la propagation des conflits dans les pays voisins ont exacerbé les crises internes en Jordanie.
Dans ce contexte explosif, les dirigeants d’Amman estiment que la politique israélienne est si dangereuse pour la monarchie que les relations avec Israël se sont sérieusement détériorées, ces dernières années.
En plus des accords de « paix », Israël tente de ligoter la Jordanie par d’autres accords dont Amman cherche coûte que coûte à s’en défaire. Il s’agit notamment de projet des pipelines de gaz et d’eau israéliens, qui devraient alimenter Amman. « Il n’est pas question d’offrir aux israéliens des produits aussi stratégique que l’eau et l’énergie qu’ils n’hésiteront à les utiliser comme arme de guerre », s’est indigné un député jordanien, ajoutant que « Des des projets aussi stratégiques se réalisent avec des allié et non pas avec des Etats qui ne vivent qu’à travers les conflits » L’Algérie et L’Arabie semblent être prêtes à défaire Amman de ce piège…
En mars 2021, dépêché à Alger, le ministre jordanien de l’Industrie, du Commerce et de l’Approvisionnement, Youssef Al-Shamali, a confirmé que l’Algérie était prête à fournir du gaz liquéfié algérien pour la Jordanie afin de lui épargner le risque d’hypothéquer sa souveraineté énergétique et par conséquent ses capacités de manœuvrer avec l’entité sioniste sur les conflits multidimensionnel au Moyen-Orient. Le ministre algérien Mohamed Arkab avait alors, déclaré que son pays « étudie sérieusement la possibilité d’approvisionner la Jordanie en pétrole brut, en gaz liquéfié et en gaz de pétrole liquéfié ».
Cette nouvelle dynamique de coopération entre deux pays, dont les échanges commerciaux n’ont pas dépassé 232 millions de dollars en 2021, a en réalité débuté après que le roi Abdallah II a rencontré le président algérien Abdelmadjid Tebboune, en Algérie les 3 et 4 décembre 2022, lors d’une visite qualifiée de « cruciale » par le Roi de Jordanie. L’Algérie qui marque son retour son retour sur la la scène international à travers son offensive diplomatique ses dernier temps trouve qu’à travers ce projet une occasion de reprendre son rôle sur la scène du moyen orient comme force d’équilibre et de dissuasion.
Quant à la question d’approvisionnement en eau, La Jordanie a affirmé poursuivre seule le projet. Plusieurs médias jordaniens ont cité des responsables affirmant qu’Amman n’avait pas besoin d’Israël pour le pipeline, et ont même évoqué la possibilité que l’Arabie Saoudite vienne à la rescousse et conclure un partenariat avec Amman, au lieu d’Israël.