Dans une démarche punitive contre le président qui mène une guerre sans merci contre l’emprise de l’Organisation Mondiale des Frères Musulmans en Tunisie et suite à sa décision de dissoudre le parlement dominé par le parti de Ghannouchi, l’Administration Biden vient de proposer de réduire de près de moitié l’aide militaire américaine à la Tunisie, arguant que les dirigeants de ce pays « continuent sur la voie de l’autoritarisme », a rapporté le site américain Al Monitor
Par | Heeba Nawel
Selon les chiffres, le budget annuel de Washington publié plus tôt cette semaine prévoit 61 millions de dollars d’aide militaire et de sécurité à la Tunisie l’année prochaine, contre 112 millions de dollars demandés pour cette année. Ce qui représente un rabotage de près de la moitié.
L’administration Biden avait dévoilé la semaine dernière un document officiel dans lequel elle formule ses projections pour l’année 2023, où pas moins de 3,2 milliards de dollars seront consacrés à « la promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance » dans le monde.
Les réductions toucheraient également l’aide économique du Département d’Etat à la Tunisie de 40 millions de dollars, une réduction de près de 50% par rapport à la demande de cette année.
La mesure manifestement punitive, interviennent dans un contexte économique et social des plus difficiles, engendré par une gestion sectaire et catastrophique des gouvernements qui se sont succédés sous l’aile du parti Ennahda de Rached El Ghannouchi, qui a régné sur le pays durant les dix dernières années post « printemps arabe ».
Soumise à l’économie de bazar et le bradage systématique des richesses de pays durant cette période, la Tunisie à court d’argent, fait face actuellement, à de lourdes pressions de la part des organisations financières en particulier, le FMI et la Banque Mondiale pour négocier la possibilité d’un « plan de sauvetage ».
« Les États-Unis cherchent à continuer de soutenir le peuple tunisien et à encourager le retour du gouvernement à la gouvernance constitutionnelle » , a déclaré un porte-parole du département d’État à Al-Monitor par e-mail.
La Tunisie souffre d’une crise économique sans précédent et a enregistré un déficit financier de 11% déjà, avant l’arrivée de Kaïss Said à la tête de l’Etat et la propagation de la crise mondiale dûe à la pandémie du Covid-19. A la fin de 2020 et la contraction de l’économie a frôlé les 8,8%. La Tunisie doit emprunter environ 7,2 milliards de dollars, dont environ 5 milliards sous forme de prêts extérieurs. il semble qu’elle soit au bord de la confrontation avec l’arrêt de l’aide financière de Washington, qui compte parmi les plus importants bailleurs de fonds internationaux.
Depuis l’Arrivée au pourvoir du parti de Rached Ghannouchi, les États-Unis ont alloué plus de 1,4 milliard de dollars pour soutenir la transition démocratique en Tunisie.
La Tunisie a également été en tête des pays du Maghreb bénéficiaires du soutien militaire américain. L’assistance militaire fournie par les Etats-Unis à la Tunisie en 2016 s’est élevée à environ 20 millions de dollars. La même valeur d’aide a été accordée en 2014.
« Les réductions de l’aide économique et sécuritaire des États-Unis, par rapport aux demandes de l’année précédente, reflètent nos importantes préoccupations concernant le recul démocratique continu. », a conclu ce responsable du gouvernement démocrate, l’un des principaux alliés de la succursale tunisienne de l’organisation mondiale des Frères musulmans durant la saison des révolutions colorées, dans le monde arabe.
Ce n’est pas la première fois que les relations entre les Etats Unis et la Tunisie arrive à l’envenimement, plus particulièrement avec l’arrivée des démocrates à la Maison Blanche.
En octobre 2021, le président Kais Saïed avait déjà, convoqué l’ambassadeur américain Donald Blome, pour lui exprimer le « mécontentement de la Tunisie », à propos de la tenue d’une plénière virtuelle de membres du Congrès américain consacrée à l’état de la démocratie en Tunisie.
Alors que les tunisiens s’inquiètent de leur avenir, suite aux crises qui s’abattent en cascade sur le monde et sur leur pays, le parti Ennahda n’a pas caché sa satisfaction de la décision américaine, appelant dans une logique, -après moi, le déluge-, les autres partenaires étrangers, à renforcer les sanctions contre la Tunisie de Kaeïss Saïed.
D’ailleurs, cette attitude suicidaire n’a pas surpris les observateurs. Sans immunité parlementaire ni couverture judicaire que leur offrait l’appareil parallèle qui a gangréné les institutions de l’Etat, Rached El Ghannouchi et ses alliés de l’anciens régime, risquent de passer le restant de leurs vies en prison. Plusieurs affaires liées aux terrorisme, intelligence avec des forces étrangères, ainsi que corruption et enrichissement illicite, pèsent sur eux.
Le porte-parole du département d’État, Ned Price, a déclaré jeudi dernier, que l’administration était « profondément préoccupée par la décision du président tunisien de dissoudre unilatéralement le parlement, et par les informations selon lesquelles les autorités tunisiennes envisagent des mesures légales contre les membres du parlement ».