Ils rejettent les présidentielles du 04 juillet et mobilisent leurs clientèles contre L’état-major de l’Armée. Cette crise politique secouant l’Algérie évolue-elle vers les scénarios classiques des printemps arabes récupérés par l’alliance islamo-atlantiste ?
Après une première phase durant laquelle l’état-major des Armées avait pris l’initiative de l’action et entamé le démantèlement des réseaux de l’ex-DRS (Direction du Renseignement et de la Sécurité, ex-dénomination de la police politique algérienne), ces derniers mobilisent leurs innombrables clientèles au sein de la société et des faux partis politiques et repassent à l’offensive générale en exploitant les hésitations du haut commandement des Armées.
Les réseaux de l’ex-DRS et leurs clientèles rejettent toute idée de présidentielles dont celles prévues le 04 juillet 2019 parce qu’ils ne sont plus en mesure d’en contrôler l’issue par la fraude comme il est de coutume depuis l’indépendance de ce pays pivot d’Afrique du Nord. L’ex-police politique a toujours rejeté le principe même de scrutin électif et privilégie les cooptations arbitraires ou les désignations de personnes “dociles”, corrompues et faciles à contrôler aux postes exécutifs. C’est ainsi que la majorité des présidents d’Assemblées populaires communales (le poste de maire n’existe plus en Algérie depuis 1963) sont cooptés ou désignés et il en est de même pour tous les postes électifs aux niveaux supérieurs (parlement, présidence) et au sein de l’ensemble des compagnies publiques et même privées ou en joint-venture avec des partenaires étrangers.
L’état-major des Armées a commis certaines erreurs concernant l’appréciation et l’évaluation de la menace interne : le FLN ou parti du Front de Libération Nationale aurait du être dissous, de même que les partis créés de toutes pièces et influencés par la police politique comme le RND ou Rassemblement National Démocratique, devenu une véritable organisation criminelle rassemblant toute la petite délinquance d’Algérie ou encore le Parti des Travailleurs ou PT, de tendance trotskyste, le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD), régionaliste et culturaliste (Gauche Bourgeoise) et des partis satellites dont les dirigeants sont impliqués jusqu’au cou dans de gigantesques affaires de corruption et de prévarication.
Des associations écrans manipulées par l’ex-police politique avec l’appui de puissances étrangères comme la LDDH (Ligue de défense des droits de l’homme) ou le RAJ (Rassemblement Action Jeunesse) continuent à faire diversion et à être les pions des réseaux souterrains de l’ex-DRS. Plus encore, même de vieux partis d’opposition comme le FFS ou Front des Forces Socialistes ont été minés, infiltrés et manipulés. Idem pour tous les partis de tendance “islamiste” qui se sont enrichis par des moyens plus ou moins répréhensibles et très peu orthodoxes.
La mainmise de l’ancienne police politique, issue en partie des réseaux du MALG ou Ministère de l’Armement et des Liaisons Générales, une instance créée vers la fin des années 50 par le défunt SDECE (Service de la Documentation Extérieure et du Contre-espionnage, ancêtre de l’actuelle DGSE) français pour saboter la Révolution algérienne, fut total sur de large pans de la société en Algérie et ressemblait au contrôle absolu qu’exerçait l’ex-Stasi sur la défunte République Démocratique Allemande (ex-Allemagne de l’Est).
Le DRS fut démantelé et dissous en 2015 après un long bras de fer avec l’état-major des Armées qui s’était allié avec l’ex-présidence pour s’en débarrasser. La montée en puissance de l’état-major qui est loin d’être monolithique effraya la présidence et cette dernière s’allia à nouveau avec la police politique et chercha l’appui de la France pour contre-balancer le général-major Ahmed Gaid Salah, Chef d’état-major des Armées. C’est à la suite d’une tentative de mettre fin aux fonctions du chef d’état-major qui a forcé ce dernier à frapper fort et entamer un nettoyage au kärcher des réseaux de l’ex-présidence et des hommes de main de l’ex-DRS et de fait l’emprisonnement spectaculaire de Said Bouteflika, conseiller et frère de l’ex-président ainsi que l’ancien patron du DRS le général major Mediene dit Toufik, son bras droit Hamid Melzi, ainsi que le général Tartag, coordinateur des services de sécurité, semblait comme un coup fatal assénée à ce que l’opinion en Algérie désignait sous le terme de mafia politico-financière. Mais cela ne fut pas suffisant puisque leurs clientèles sont toujours en place et disposent surtout du soutien et des moyens de l’administration.
Ces derniers disposent d’un réel pouvoir de manipulation sur les populations.
Le démantèlement de la machine à fraude ne pouvait que pousser les anciens réseaux à rejeter tout processus électoral et à privilégier la désignation d’une sorte de comité de salut public transitoire ou encore une instance transitoire dirigée par des “personnalités publiques connues” (sic) ou encore un comité collégial, dans la pure tradition de la police politique. En filigrane, le rejet de tout processus démocratique et le recours aux cooptations par des conciliabules secrets semble caractériser l’empreinte génétique de l’ex-DRS et ses soutiens de Paris.
Une situation similaire s’est produite en 1992 avec la mise en place d’un haut comité d’État ou une sorte de présidence collégiale pour gérer le pays après l’interruption d’un processus électoral (législatives) et la dissolution du pouvoir législatif après de vraies fausses manifestations “spontanées” demandant l’intervention de l’Armée pour sauvegarder la République. Paradoxalement, ce sont les mêmes forces ayant exigé le recours à l’Armée et son intrusion explicite dans le champ politique à l’époque qui la combattent actuellement et veulent la neutraliser.
Il semble évident que les autorités actuelles ne peuvent organiser des présidentielles le 04 juillet prochain en l’état actuel des choses.
Le sabotage des préparatifs relatives à ce scrutin par les mairies acquises à l’ex-DRS et à la mafia financière et plus particulièrement le RND et le FLN rend la tenue d’une présidentielle plus qu’improbable à cette date.
Demeure l’option des vieux apparatchiks du système désuet, qui semble séduire une partie d’une opinion conditionnée par le culte des personnes providentielles. Le choix est maigre : l’ancien régime a tenu à faire le vide autour de lui et il n’y a presque plus de personnalités fiables, réellement indépendantes et idéologiquement neutres.
Cette situation inédite sur le plan interne coïncide avec une montée des périls sur le plan géostratégique. L’option de déstabilisation du Sahara Algérien vient d’être réactivé après l’échec de plusieurs tentatives de générer des troubles en Kabylie. Des agents dormants y ont été chargés de créer des troubles dans les zones de production d’hydrocarbures et dans une région ou cohabitent des communautés comme Ghardaïa.
L’état-major des Armées se trouve devant des choix très difficiles mais pas impossibles. Tout dépendra du degré de cohésion au sein du haut commandement militaire et de la capacité des populations à percevoir les enjeux actuels autour de leur pays.
Maghreb-facts/ sources strategika51.org